
Article écrit en 2025 par Laure Lacaille, sous la guidance de Nadia Cluzel
Introduction
C’est avec mon fils que j’ai poussé pour la première fois la porte d’une ludothèque. C’était il y a une dizaine d’années, à Carbon Blanc dans l’agglomération Bordelaise. Un endroit unique, riche et très facile d’accès. Un lieu de rencontres et d’échanges où on a pu se sentir un peu comme chez
nous. Si certaines de nos visites étaient improvisées, d’autres étaient prévues et nous nous y rendions à plusieurs, entre amis. Tous les espaces de la ludothèque furent exploités jusqu’à tard :
les aménagements de jeux symboliques et de constructions, les tables des jeux de règles et la zone d’emprunt pour pouvoir poursuivre le jeu une fois rentrés à la maison.
Même si cette première approche avec les ludothèques pourrait suffire à motiver une envie de reconversion en tant que ludothécaire, ce n’est pourtant pas cela qui m’a poussée à suivre cette année de Licence Professionnelle.
J’exerce aujourd’hui le poste de chargée de gestion RH au sein de la commune d’Artigues-près-Bordeaux. Rien à voir avec le jeu, donc. Cela fait maintenant 17 ans que je travaille pour cette ville.
Durant ces années, j’ai acquis une certaine connaissance de terrain, de l’expérience, mais peut-être moins « des chiffres ». A propos de la commune, j’ai pu acquérir une connaissance de sa géographie, de sa population, de son tissu associatif, de son histoire mais également de son ancrage dans son
environnement politique. Au bout de 17 ans, il me semble avoir également une vision assez précise du fonctionnement de cette municipalité. Du fonctionnement des services, des directions, des délégations de chacun des élus, des liens avec les divers organismes privés et publics que la collectivité entretient.
Avant d’être affectée au service des Ressources Humaines, j’ai évolué au sein de plusieurs services. C’est un peu le lot des fonctionnaires des « petite communes ». On est amené à toucher à tout. Mais au fil du temps, mes différentes missions m’ont écartée du contact direct avec le public pour me conduire vers des missions plus administratives. Pourtant, c’est une des facettes du « service
public » qui me permettait de mettre le plus de sens dans mes missions professionnelles. C’est lors d’une discussion que je qualifierais « d’anodine » avec la directrice du pôle enfance, que l’idée de me former au métier de Ludothécaire a germé. Et pour finir, au travers d’autres discussions avec les responsables d’autres directions, il a semblé que l’idée d’une ludothèque sur le territoire n’était pas tout à fait hors de propos. Car pour beaucoup, le jeu faisait déjà partie du quotidien, mais nous y reviendrons.
Avec l’accord du maire de la ville et de ma direction, j’ai donc posé un congé de formation de 6 mois. J’ai ainsi pu me former de manière théorique lors des cours et de manière pratique, lors de 3 stages qui m’auront permis de découvrir 3 typologies de ludothèques, me permettant d’avoir, sur une relative courte période, une vision du champ d’activité possible en ludothèque en fonction des
différents types de structures.
C’est en premier lieu au sein d’une ludothèque associative, que j’ai effectué mon premier stage.
Encadrée par une ludothécaire nouvellement diplômée de la Licence Professionnelle MJGL, j’ai pu observer de l’intérieur les rouages organisationnels d’une association ludique clairement identifiée sur le territoire et gérant 3 structures sur 3 communes de la métropole Rive droite.
Dans un second temps, j’ai souhaité découvrir une structure municipale. Mon choix s’est porté sur une ludomédiathèque en QPV, Quartier Prioritaire de Ville, sur la rive droite de Bordeaux. Une approche d’autant plus spécifique que les espaces ludiques côtoient les lecteurs et lectrices de tous les âges.
Et enfin, il m’aura été permis de découvrir la ludothèque de l’Espace de Vie Social de Mombrier, village rurale du Nord Gironde. Ici pas de personnels spécifiquement formés au métier de ludothécaire, mais une équipe engagée et déterminée à maintenir des actions visant à maintenir les liens entre les habitants.
Durant toute cette année, de nombreuses discussions, de nombreux échanges sont venus enrichir les apports que nous avons eus lors des interventions théoriques. Le rapport au genre, le développement de l’intelligence du jeune enfant, la violence dans le jeu (sujet de la rencontre professionnelle 2025), les difficultés financières de certaines structures, le jeu et les écoles, etc…
Toutes très intéressantes mais mon attachement profond à l’environnement m’aura donné envie d’approfondir cette large question. En premier lieu, cela aura fait écho à ma formation initiale, un BTS Agricole, en Gestion et Protection de l’environnement. Ma situation professionnelle actuelle m’ayant éloignée des préoccupations environnementales, questionner les actions possibles dans c ce
nouveau champ d’activité m’a enthousiasmé. Ensuite, il me semble que l’écoresponsabilité et le développement durable sont des enjeux sociétaux très actuels. Aussi, il m’a paru intéressant d’interroger les professionnels du jeu sur ce sujet. C’est cette double résonance, à la fois professionnelle et intime, a rendu ce travail particulièrement stimulant et porteur de sens.
Au travers des stages, des rencontres et des recherches, il m’aura été permis de constater que les ludothèques pourront mener des actions écoresponsables plus ou moins ancrées dans les pratiques quotidiennes. Toutes, par exemple, n’auront pas la même politique d’acquisition des jeux et jouets.
Certains espaces offrent une certaine abondance de jouets dans les espaces et d’autres, au contraire, une certaine sobriété. Je me suis également questionné sur la provenance de ces jeux et jouets ? Quels sont les circuits d’approvisionnement ? J’ai pu m’interroger également sur la place et l’utilisation des espaces extérieurs dans la pratique des ludothèques. En quoi ces lieux en plein air peuvent-ils enrichir l’expérience ludique ? Quelles sont les limites ou les conditions nécessaires pour que cette ouverture vers l’extérieur soit réellement
bénéfique pour les usagers ?
Autre questionnement concernant la sensibilisation des publics à l’écologie : le développement durable fait-il partie des projets des ludothèques ? Quel rôle les ludothèques peuvent-elles jouer dans la promotion de pratiques écoresponsables ?
De nombreux questionnements qui auront conduit mon raisonnement pour tenter de répondre à une question centrale : Comment les ludothèques intègrent-elles les principes du développement durable dans leurs pratiques, et en quoi peuvent-elles contribuer à une démarche écoresponsable ?
Pour pouvoir répondre à ces questions, il aura fallu compléter les cours théoriques suivis à l’IUT.
Une grande part de ma professionnalisation se sera faite au contact des professionnels qui m’auront soutenue durant 8 semaines lors des stages d’immersion. En plus de leur accompagnement, être au cœur du fonctionnement des structures m’a permis d’effectuer un certain nombre d’observation
sur leurs pratiques et leurs engagements écoresponsables.
J’ai réalisé 5 entretiens exploratoires me permettant de recueillir le point de vue de ludothécaires et autres acteurs ludiques. Ce travail et l’analyse des données qui en a découlé permettra d’enrichir ma réflexion et d’ancrer mes recherches dans la réalité du terrain.
Parallèlement, j’ai réalisé un travail de recherche documentaire en m’appuyant sur des ouvrages spécialisés, des articles professionnels et des ressources institutionnelles. Ce croisement entre pratique et théorie a contribué à enrichir ma compréhension du sujet et de structurer ma problématique.
Dans l’objectif de proposer un projet de ludothèque adapté au territoire artiguais, il m’a paru essentiel de rencontrer les services qui utilisent le jeu au quotidien et de m’informer sur les actions écoresponsables déjà mises en place à Artigues-près-Bordeaux.
J’ai ainsi mené un entretien avec l’adjointe au maire en charge du développement durable, de la mobilité et de la culture, ainsi que deux entretiens avec les directrices des services petite enfance et jeunesse de la commune.
Ces rencontres viendront nourrir ma réflexion et également enrichir mon propos sur le jeu écoresponsable, en apportant des exemples concrets et en ancrant mon projet dans les dynamiques déjà présentes sur le territoire.
Grâce à ces échanges et aux nombreux apports reçus tout au long de l’année, je suis désormais en mesure d’envisager un projet professionnel concret Artiguais, en cohérence avec les spécificités du territoire.
Aussi, ce mémoire vise à synthétiser les fruits de mon travail de recherche en suivant une progression logique. Dans une première partie, j’exposerai le contexte professionnel dans lequel s’inscrit ma réflexion. La deuxième partie sera consacrée au cadre réglementaire et théorique, permettant de poser les bases du sujet. Ensuite, je détaillerai la méthodologie de recherche adoptée,
avant de présenter les résultats de l’enquête de terrain. Enfin, je conclurai par des pistes d’actions
et des réflexions sur la professionnalisation, en lien avec les enjeux identifiés.
Vous trouverez ici un lien vers le texte intégral.
Sommaire
Introduction p.6
Partie 1 – Jeu et développement durable à l’échelle communale p.10
1.1- Contexte géographique et politique de la ville p.10
1.1.1 – Bref portrait de la ville d’Artigues-près-Bordeaux p.10
1.1.2 – Documents structurants les actions écoresponsables et les actions éducatives p.12
1.2 – Artigues et actions écoresponsable, entretien avec Corine Lesbats p.13
1.3 – Artigues et son lien au jeu p.15
1.3.1 – Entretien avec la directrice de la direction Petite Enfance p.15
1.3.2 – Entretien avec la directrice de la direction Enfance p.17
Partie 2 – Cadre théorique p.20
2.1 – Définition de l’écoresponsabilité et du développement durable p.20
2.2 – Textes de références du principe d’écoresponsabilité et du développement durablep.21
2.2.1 – A l’échelle internationale p.22
2.2.2 – A l’échelle nationale p.23
2.2.3 – A l’échelle régionale, départementale et locale p.24
2.3 – Les experts du jeu et les notions d’écoresponsabilité p.24
2.3.1 – Le jeu libre et nature p.24
2.3.2 – Ecoresponsabilité et ludothéque p.26
Partie 3 – Questionnements et Méthodologie de recherche p.29
3.1 – Questionnements et hypothèses conduisant ma recherche p.29
3.2 – Méthodologie de recherche p.30
3.2.1 – Une année de formation p .30
3.2.2 – Stage, terrain d’observation p.30
3.2.3 – La ressource documentaire et les lectures p.31
3.2.4 – Les entretiens de recherche p.31
3.3 – Vers les résultats d’enquête p.32
Partie 4 – Les résultats de l’enquête terrain p.33
4.1 – Stage de professionnalisation en Ludothèque p.33
4.1.1 – Ludothèque « Ô fil du jeu de Carbon Blanc »p.33
4.1.2 – Ludomédiathèque de Cenon p.35
4.1.3 – Ludothèque de l’Espace de Vie Sociale de Mombrier p.37
Page |44.2 – Entretiens de recherche p.39
4.2.1 – Rencontres avec des ludothécaires p.39
4.2.1.1 – Mélanie, ludothèque associative urbaine – Ludothèque 1p.39
4.2.1.2 – Élodie, ludothèque associative rurale – ludothèque 2p.41
4.2.1.3 – David, ludothèque associative péri-urbaine – ludothèque 3p.42
4.2.2 – Autres acteurs ludiques p.44
4.2.2.1 – Vanessa Tauzin, ludothèque éphémère et la boutique du jeu, Langon p.44
4.2.2.2 – Marion, la boite à jouer, École élémentaire de de Saint Jean d’Illac p.47
4.3 – Lectures et recherches documentaires p.49
4.3.1 – La seconde vie du jouet p.49
4.3.1.1 – Mémoire de recherche Jérémy Aigret p.49
4.3.1.2 – Replay p.51
4.3.2 – Des collectifs mobilisés p.52
4.3.2.1 – Prix Lizzie Magie p.52
4.3.2.2 – Les rencontres ludiques p.53
4.3.3 – Espaces extérieurs ludiques p.54
4.3.3.1 – Les cours Oasis p.54
4.3.3.2 – Les terrains d’aventure p.56
4.4 – Résultats de l’enquête p.57
4.4.1 – Trois grandes thématiques émergentes p.58
4.4.2 – Les freins, quels sont les limites au jeu écoresponsable ?
Partie 5 – Professionnalisation p.61
5.1 – Ce que le mémoire m’a appris pour penser un projet p.61
5.2 – Des pratiques transférables p.62
Conclusion p.63
Bibliographie
Brougère, G. (2003). Jouets et compagnie. Stock.
Périno. O (2014). Des espaces pour jouer : Pourquoi les concevoir ? Comment les aménager ? Éres
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Haget, A. (2018). De l’inventaire des espaces verts par la commune d’Artigues-près-Bordeaux, à une réflexion sur
un nouveau mode de gestion durable [mémoire de Master 2]. Université Bordeaux Montaigne.
Aigret, J. (2024). Les vieux jeux se la jouent : Étude sur la valorisation du jeu d’antan en ludothèque [Mémoire
de Licence professionnelle]. Université Bordeaux Montaigne.
Bertin, S. (2014). Ludothéque et territoire. La ludothéque au cœur du développement local de son
territoire [mémoire de licence professionnelle]. Université de Bordeaux Montaigne.
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